Souvenirs de Dataharvest 2016

Du 3 au 5 juin se tenait à Malines, en Belgique, le Dataharvest, conférence annuelle sur le journalisme de données et d’investigation organisée par Journalismfund.eu. Mon petit bilan perso et des coups de coeur.

C’est un des rendez-vous incontournables en Europe pour qui est passionné par son métier et les façons de le pratiquer : 323 journalistes de 41 pays qui se rassemblent durant trois jours, parlent boulot mais pas que, échangent techniques et points de vue, assistent à des mini-conférences, des ateliers, des keynotes… Bref, que de l’inspirant et du rafraîchissant.
J’ai épinglé quelques coups de coeur. Sans être exhaustif, parce que ma mémoire est déjà défaillante, aussi parce que plusieurs événements étant à chaque fois organisés en parallèle, il n’est par la force des choses pas possible de tout voir. Vous pouvez jeter un oeil au – copieux – programme ici. Choisir, c’est renoncer…

  • The Tennis Racket. Déjà un classique : Heidi Blake et John Templon, de Buzzfeed, ont analysé les cotes de paris de 26.000 matchs de tennis ainsi que leur évolution et en ont conclu que de fortes présomptions de triche pesaient sur certains d’entre eux. La présentation de l’enquête et celle de la méthodologie employée ont ouvert la session Dataharvest. tennis
  • Panama Papers. Une enquête dans laquelle j’ai eu la chance d’être impliqué aux côtés de centaines d’autres journalistes (dont pour la Belgique, mes collègues Lars Bové, Kristof Clerix, Alain Lallemand et Xavier Counasse) et qui fut présentée en long et en large à ce Dataharvest. Coup de chapeau à l’ICIJ et au Süddeutsche Zeitung pour avoir réussi à monter un tel projet.panama
  • L'”importation” de jeunes footballeurs provenant d’Afrique ou d’Amérique du Sud. Mêlant travail sur les données et reportage de terrain, “Game on” et “Who extracts the value of Nigerian football players”  ont été présentés et commentés.
  • Null Ctrl est un projet génial de Dagbladet.no : s’aidant du moteur de recherche Shodan, les journalistes ont pu pointer des milliers de failles de sécurité dans des objets connectés (caméras de surveillance, systèmes d’automation…) en Norvège. J’adore ce travail mais ayant déjà assisté deux fois à sa présentation et bien qu’ayant passé des heures sur Shodan, je n’ai toujours pas compris comment avaient procédé les collègues norvégiens…
  • Les pirates de la Méditerranée : un travail sur la façon dont des cargos pourris sont affrétés pour transporter faire traverser la Méditerranée à des migrants. Un super boulot, réalisé par une équipe de 9 journalistes, dont les collègues Delphine Reuter et Frédéric Loore.
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  • Le prix des médicaments. Encore deux toutes bonnes enquêtes sur le prix des médicaments en Europe. Le mieux est de voir par vous mêmes : Medicamentalia a notamment été produit par la data-journaliste espagnole Eva Belmonte tandis que l’autre travail (Pourquoi certains médicaments oncologiques sont-ils plus chers dans les pays à bas PIB) était présenté par Eric Stefano Breitinger et David Leloup.
  • Mobile surveillance est une enquête de haut vol menée par les Norvégiens de l’Aftenposten sur l’utilisation à Oslo des IMSI-catchers, dispositifs électroniques embarqués dans des voitures, voire dans de simples valises et qui permettent d’intercepter les données des communications GSM.
    surveillance
  • L’European Investigative Collaboration (EIC) est un réseau récent, né de la collaboration de neuf médias européens, dont Le Soir. L’objectif est de regrouper forces et moyens pour mener des projets communs à dimension européenne, comme “Mapping the weapons of terror“, paru il y a quelques mois.

 

Bref, que du tout bon durant ces trois jours avec à mon sens, ces deux lignes de force, ces deux mantras : d’une part, le sentiment que le journalisme de données ouvre de nouvelles voies au journalisme d’investigation; d’autre part celui que pour répondre à des problématiques mondiales, les journalistes n’ont d’autre choix que se regrouper en réseaux, fussent-ils éphémères, le temps d’un projet.